Fabienne Ameisen

Béla, amie, sœur, mère, petite fille,

nous te portons en nous comme tu nous as portés en toi

Tu nous as tant donné de toi

tant de ta présence, ton amitié, ton aide fraternelle

ton histoire

l’Histoire de ce monde qui t’a vue lui survivre, et vivre, si forte

si forte pour les autres

présente et si vive

joyeuse et grave

si vive, si présente

tu nous donnes tant

Oh comme tu fais partie de nous !

Un jour je racontais à la psychanalyste lumineuse que tu étais l’étrangeté de ce bloc de béton cellulaire qui s’était métamorphosé entre mes mains : le bloc avait pris, au cours du temps, d’abord l’apparence d’un vieux Hohem puis d’une femme grave, et puis – au moment de la mort de ma mère – d’une matrice tendre à ailes d’aigle en train d’accoucher…

Ce jour-là, dans l’être naissant, j’avais reconnu ton visage. Alors tu m’as dit ton histoire, et chaque élément de la sculpture, à travers le temps, visible et invisible, était une partie de l’histoire que tu me confiais.

Un autre jour, c’était en contemplant un pin maritime dont des branches avaient été emportées dans les tempêtes et qui dansait, immobile, dans le soleil couchant que je t’ai reconnue en lui.

Le pin maritime a perdu sa dernière branche vive dans la tempête d’une nuit. Son tronc dansant, majestueux, sublime, danse, danse encore dans le soleil doré.

Tu as tant donné de toi

Parmi ces dons de vous à nous, généreux et sans limites, aujourd’hui, de vous deux, si beaux, j’entends la voix harmonieuse de votre chant,

la voix d’Henri, la voix de Béla, une harmonie paisible dans le vacarme des jours, un paysage, soleil et sable et l’eau pure des collines verdoyantes

Les mots ont du mal à dire le chagrin de ta perte et la joie de t’avoir connue

Ton souvenir est bénédiction.

Fabi